Ce dimanche à 12h55 sur Ici Auvergne-Rhône-Alpes, Chroniques d’en haut propose une escapade hors du temps au cœur de la montagne de Lure, dans les Alpes de Haute-Provence. Loin des clichés d’une Provence figée entre cigales et oliviers, Laurent Guillaume nous invite à une immersion dans un territoire rude et fascinant, sublimé par les mots de Jean Giono. Une émission entre nature, littérature et humanité, dans les pas de celui qui fit de cette montagne le théâtre poétique de son œuvre.
Giono, la montagne et le retour à l’essentiel
La montagne de Lure, culminant à 1 826 mètres, trône avec majesté entre les Alpes et la Méditerranée, offrant des panoramas saisissants qui ont su captiver l’écrivain Jean Giono. C’est dans cet écrin de nature brute que Laurent Guillaume part à la rencontre d’un autre passionné : Arnaud Poupounot, accompagnateur en montagne et amoureux des lettres. Ensemble, ils explorent les ruines du hameau du Haut Montsalier, vestige d’un monde en marge où la terre dicte encore ses lois. Dans cette atmosphère chargée d’histoire et d’élévation, les deux hommes évoquent le rapport profond qu’entretenait Giono avec la nature, celle qui ne pardonne pas, loin de l’image idéalisée souvent accolée à la Provence. Ils montent aussi vers les cimes de Lure, là où l’air devient rare et l’horizon s’ouvre sur le Ventoux et, plus loin encore, sur la mer. Là, Giono puisait une forme de liberté absolue, célébrée notamment dans Présentation de Pan, texte où la montagne devient personnage mythologique et refuge intérieur.
Les bergers, figures libres et poétiques
Jean Giono ne s’est jamais contenté de contempler la nature : il en a fait le socle d’une humanité profonde, incarnée notamment par les bergers. Ces hommes de silence, façonnés par les éléments, ont longtemps occupé une place centrale dans ses récits. Dans l’émission, on découvre l’histoire du berger Albert, poète autodidacte dont les mots gravés dans la pierre ont traversé les décennies. Son œuvre éphémère a trouvé écho chez Hubert Blond, qui a entrepris de retracer sa vie dans un ouvrage bouleversant. Mais la figure du berger n’a pas disparu : elle a simplement évolué. Frédérique Bossut, éleveuse de chèvres et productrice du fameux Banon, témoigne de ce lien toujours vivant entre l’homme, l’animal et le paysage. Si les transhumances au long cours se font plus rares, la passion, elle, reste intacte. Et avec elle, cette solitude choisie, ce rapport intime à la terre qui faisait déjà vibrer les pages de Giono.
Un territoire littéraire vivant, ancré et inspiré
La montagne de Lure, ce n’est pas seulement un paysage : c’est un monde habité, hanté par les mots. Car si Giono en fut l’un des plus fervents ambassadeurs, d’autres écrivains comme Henri Bosco ou René Frégni ont eux aussi succombé à la force tellurique de ce territoire. À Banon, le Bleuet, librairie improbable au cœur du village, incarne cette passion littéraire. Fondée par Marc Gaucherand en 1990, elle rassemble plus de 110 000 ouvrages et n’a jamais fermé ses portes, pas même un seul jour de l’année. Un exploit dans un monde de plus en plus dématérialisé. Le lieu est à l’image de la région : exubérant, sincère, imprévisible. Là encore, les mots prennent racine, se confrontent au réel et racontent les vies minuscules et immenses de ceux qui peuplent cette Provence de l’intérieur, celle que Giono a tant aimée, sans folklore mais avec une infinie tendresse.